Nos nouvelles vies

Construire ensemble un futur positif

Étape 3 sur 3
Publication 15/07/2021 - 15/12/2022
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A la fin, ça ira

17/12/2021 15:39  

En un mois la moitié de l'humanité a été invitée - avec plus ou moins d’insistance - à rester chez elle. Alors qu'habituellement et à tout instant, un million d'humains ne touchaient plus terre, en ce moment, rares sont ceux qui cumulent des miles. Sept décennies de libre-échange, et on a fermé les frontières en quelques jours, retournant à des réponses nationales, où les pays entre eux se chamaillent et se font des coups bas pour récupérer des masques et des réactifs, peut-être bientôt du blé et du riz. En cinq jours, les Etats-Unis ont recensé 3 000 000 de chômeurs additionnels, chiffre sans précédent mais limité par la saturation informatique qui empêche de nombreux autres de s'inscrire... pardon, de se déclarer, leur système social n'étant pas si généreux que ce à quoi nous sommes habitués sur le vieux continent. Mes amis dans le tourisme, la restauration, l'événementiel, ont passé des nuits agitées les dernières semaines se demandant quand et d'où proviendrait le prochain chèque, ou essayant de résoudre des équations impossibles à trop d'inconnues : combien d'employés licencier pour sauvegarder le poste de combien d'autres, et pour combien de temps ? Mes amis soignants sont pour beaucoup exténués et sollicités par leurs proches pour endosser en plus un rôle de devin, ou de juge de paix sur Raoult et la chloroquine. Bref, la période est singulière et importante.

Toutefois - et c'est très possible que quelque chose ne tourne pas rond chez moi - je vais bien. Je ne dis pas cela de façon nombriliste (emphase sur l'adverbe "bien" et non le pronom "je") mais plutôt, je n'ai pas l'impression que le monde s'écroule plus que d’habitude. Oui, cette phrase se veut optimiste !

Ce détachement singulier que je vis, me renvoie étrangement au 13 novembre 2015. Alors que je prenais un verre entre amis à deux rues de la Belle Équipe, alors qu'après un moment barricadé avec des inconnus vivant ensemble tous le même questionnement incrédule, je rentrais seul chez moi à travers des rues vides, puis à travers les cordons de polices et d'ambulances habillé de la lumière des gyrophares, alors qu'au cours des jours et semaines toute conversation entonnée par un laïus sur ces événements, ça allait aussi. L’incident était bien sûr plus intense, plus violent, plus local et ponctuel que le Covid, mais le virus n’est-il pas plus intense que la crise climatique que nous vivons aussi. Le rapprochement peut peut-être surprendre mais une crise est une crise. En 2009, quand j'ai été mis au chômage technique car le monde s'écroulait aussi alors, ça allait aussi. Ineptie possible d'un mortel ne comprenant pas sa propre fragilité, je me suis toujours dit et continue à penser qu'il y aura un lendemain.

Peut-être que tout cela me dépasse, ou inversement que je prends trop de recul sur la situation. Peut-être que je vis dans cette bulle privilégiée de ceux que la tragédie personnelle a pour l'instant évités. Toutefois, mon expérience, heureusement limitée en la matière, me fait penser que quand les tragédies sont personnelles, le fait qu’elles arrivent à d’autres au même moment importe finalement assez peu.

Je ne souhaite aucunement minimiser les difficultés actuelles ou celles qui nous attendent les prochains mois, mais je pense que notre monde devait changer – climat, inégalités, questions d’éthique technologiques, manque d’imagination d’un monde meilleur – et que nous étions nombreux à douter de notre capacité à agir avec assez de radicalité pour dévier l’Histoire sur d’autres rails. Nous venons d’avoir la preuve qu’à la fois, cela était possible et qu’à la fois, vivre cette radicalité par contrainte n’était pas souhaitable.

Nombreux espèrent et espèreront revenir à la « normale » le plus vite possible, et c’est compréhensible. Cependant, je suis aussi rassuré de voir tant de gens appeler au changement, appeler une radicalité mais cette fois-ci choisie. Je ne parle pas de révolution mais d’un souhait profond de changer les règles du jeu pour s’aligner avec notre volonté de faire société et de faire société différemment. Encore faudra-t-il que cet appel ne soit pas une bouteille à la mer destinée à ce que d’autres fassent, et bien un mantra que tout un chacun puisse se répéter en œuvrant à ce changement, mais je suis et demeure optimiste.

A la fin tout ira bien, et si cela ne va pas bien, c 'est que ce n'est pas encore la fin.

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Référence : BM-PROP-2021-12-795
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