Empreinte numérique

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Source: {"body":"Je ne peux pas me plaindre, je suis plutôt bien lotie seule à Paris sous les toits, avec bouquins et matériel nécessaire.\r\n\r\nMes proches vont bien, même si le manque de masques du personnel soignant inquiète et les nouvelles angoissent. Je le vis finalement bien ce confinement dans mon décor familier et rassurant. Une fois l'incrédulité devant les premières annonces de l'épidémie et le premier vertige passés, c'est même plutôt un temps béni. Quelle occasion a-t-on de vivre en hermite, seul avec soi-même, et que ce soit socialement, non pas seulement admis, mais nécessaire? Encore faut-il bien s'entendre avec soi-même certes.\r\n\r\nDe fait, j'ai conscience de faire partie des privilégiés du confinement pour de multiples raisons. Ceci étant, c'est un luxe que je paie et vais payer au prix de mes économies et d'une dose de frustration aux impacts non cernés. Indépendante, je vogue totalement à vue pour une période indéterminée. Le temps que la crise passe… que l'on s'ébroue tous après le choc, que les comptes soient faits, que les besoins clairs se dessinent, que les budgets se débloquent et que les recrutements suivent...\r\n\r\nMe voilà donc en pleine zone d'incertitudes. Sur tous les plans. Bizarrement, je le vis plutôt bien - la plupart du temps. J'essaie de me rendre le plus utile possible (lancement de campagne de collecte de fond, aides administratives, quelques sorties de distribution de nourriture aux sans-abris), et garde le contact avec mon réseau.\r\n\r\nNotes pour moi même:\r\n\r\n- en dépit d'un enthousiasme un peu forcé et beaucoup d'ambition pour cette période de confinement, il me faut admettre que les résultats sont moindres qu'initialement envisagés. Non je n'ai pas lu quinze bouquins, non je n'ai pas fait une séance de gym tous les jours, non mon espagnol n'a pas progressé et oui, j'ai cédé aux sirènes de quelques émissions et séries en replay.\r\n\r\n- Ne jamais négliger l'importance et la longueur probable de la phase d'adaptation avant de retrouver un rythme - un peu d'indulgence ne fait pas de mal en cette période\r\n\r\n- Utilité de relire les Pensées pour moi-même et de garder son énergie pour les choses qui dépendent de soi\r\n\r\n- Importance d'une discipline bienveillante: conserver un rythme de vie régulier, de sommeil de repas pour éviter une désorganisation et une baisse potentielle de moral - La dérive est pernicieuse et plus rapide que j'aurais tendance à le croire je pense.\r\n\r\n- Importance de s'entourer de gens ET lucides ET profondément positifs;\r\n\r\n- Prise de conscience de la dépendance absolue au téléphone et internet ( à travailler?..).\r\n\r\nEn termes d'avenir, j'éprouve à la fois beaucoup de craintes devant l'inconnu et une forme de curiosité enthousiaste aussi face aux changements. On est à un tournant - ça y est - voilà le moment de voir l'humanité à l'œuvre, avec, à la clé, l'avènement -ou non- de son Humanité.\r\n\r\nLa liste des craintes post-pandémie Covid 19 est néanmoins longue.\r\n\r\n- Pour le monde: un coût d'une violence jamais vue avec misère, instabilité sociale, mort, arbitraire, régimes dictatoriaux et désorganisation face aux catastrophes climatiques d'un système à ses limites écologiques - irrationnalités dûes à un sentiment d'insécurité généralisé.\r\n\r\n- Pour la France: repli sur soi, populisme, fragmentation sociétal et oubli des valeurs de la Nation\r\n\r\n- Pour mon cercle proche: des accidents de vie, des faillites, des clivages, voire des ruptures forcées selon les réactions, comportements et valeurs véhiculées dans un monde devenu instable.\r\n\r\n- Pour moi enfin, la crainte de manquer de temps, d'énergie, de sécurité (physique, psychique, matérielle), de liberté, d'indépendance, de compassion ou de courage face aux défis et décisions qui vont s'imposer.\r\n\r\nLe changement est toujours au mieux perturbant et dérangeant, au pire forcé, subi, non maitrisé. Nous allons payer le prix de décennies d'exploitation sans vergogne de ressources finies. Finitude des ressources versus infini de nos désirs, caprices et peurs: voici un combat perdu d'avance pour une humanité sans intériorité, ni recul sur ses besoins véritables. S'il manque un modèle de maturité à notre espèce en crise de croissance, j'ai envie de garder foi en elle, si souvent crétine, grégaire, mesquine mais si inventive, émouvante et attachante à la fois.\r\n\r\nReste à définir et nous donner les moyens - individuellement et collectivement - de réagir rapidement pour la survie de notre espèce dans sa plus belle expression.","title":"Considérations du dimanche soir - Confinement J + 19"}

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