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Construire ensemble un futur positif

Étape 3 sur 3
Publication 15/07/2021 - 15/12/2022
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Ame d'enfant et confinement

17/12/2021 14:43  

Cela faisait 7 semaines que nous étions enfermé chez nous, à Raanana, en Israel. On ne peut pas dire que c'était si désagréable. Il y a ici le beau temps, le petit jardin et surtout ces arbres fruitiers gorgés de trésors qui nous entourent.

Le début du confinement peut s’apparenter pour moi à une longue méditation, entre-coupée de soubresauts et de bavardages. Mais il n'empêche qu’il s’agit d’une longue période d’introspection au cours de laquelle, comme dans la méditation, j’observe les idées qui me traversent. Je les laisse émerger. Je les accueille avec amour et même, parfois, je remercie le confinement de leur avoir donné une véritable place dans ma vie.

L’écriture tous les matins. Des nuits de sommeil, parfois chahutées, mais qui me laissent me souvenir de mes rêves et comprendre ce qui me tracasse. L’amour de mes parents, de mes enfants, de mon mari comme autant de nourritures essentielles pour l’âme. Et puis, le manque, comme meilleur indicateur de ce que je désire. Les paroles de certains amis qui me reviennent. Des souvenirs en flash qui me transpercent. Qui tout simplement sont des indicateurs de celle que je suis et que j’ai mis tant de temps à comprendre.

Comme tous les jours, lundi, je suis sortie à vélo avec ma fille Elsa et nous avons croisé une maman de son école avec un aquarium dans la main. De part et d’autre de la route, avec nos masques et nos casques de vélo, la scène était plutôt cocasse. Et pourtant, chaque rencontre, si furtive, si hasardeuse est une trace de vie sociale qui nous éveille. Alors comme ça, cette maman était en route pour un magasin qui vendait des petits poissons avec un aquarium dans la main…Sur le moment, j’étais sortie sans rien, sans argent entre autres, et je me voyais mal transporter ces petits poissons dans le panier avant de mon vélo qui ne tenait qu’à un fil…

Le lendemain, j’avais espéré que ma fille avait oublié cette idée. J’avais repris mes idées et le contrôle de la situation. Le deconfinement allait avoir lieu prochainement en Israël. Nous allions tenir sans aucune bestiole de ce genre à la maison.

Il est vrai aussi que des voix dissonantes surgissaient.

Apres 7 semaines de confinement, nous Ă©tions un peu Ă  court de jeux en tous genres, de films familiaux, de recettes de cuisine-trop-sympa-Ă -faire-ensemble, de dessins avec ou sans tutorials.

Mais ma fille Elsa attendait que je l’emmène à la boutique de pied ferme. Son plan secret, c’était d’acheter des tortues d’eau et d’en faire la surprise à son frère et sa sœur. Devant son insistance, je m’executais. Seulement, voila, arrivés à la boutique, la sentence est tombée. Les tortues d’eau sont en voie d’extinction donc interdites à la vente. Moitié soulagée, moitié déçue, nous traînions des pieds dans cette boutique où un semblant de normalité régnait tandis que le reste de la ville était quasiment mort.

Et puis, j’ai aperçu une boule noire dans une cage ouverte. Ma fille Elsa s’est approchée. Un petit lapin… Le vendeur a dit quelques mots comme “ce lapin est très spécial, c’est une race à part, regardez ces oreilles” et quelque chose en moi a lâché. Brutalement. J’ai essayé de le cacher à ma fille, de rester maître de la situation, mais je voulais ce lapin encore plus qu’elle. Impossible d’expliquer. C’est mon âme d’enfant qui a parlé. Qui a crié même. Qui s’est enfuie de mon corps d’adulte.

Depuis le début du confinement, je donnais des cours en ligne sur l’éveil de la créativité. Sur le lâcher prise. J’expliquais que la créativité ne pouvait surgir qu’à condition qu’on renoue avec son âme d’enfant. Car c’était là que logeait notre âme artiste. Ce petit lapin noir était venu pour me ramener dans ma maison intérieure.

Toutes mes objections habituelles d’adulte contrôlante sont tombées face à la beauté de cet animal. Je me suis laissée porter par le moment et je n’ai plus réfléchi. Quand le vendeur s’est mis à nous donner des indications de comment s’en occuper, de son prix, parler du format de la cage adéquate, je n’étais déjà plus là. Aucune de ses paroles n’est arrivée à moi. J’étais ailleurs. Transportée dans l’instant et aussi en train d’accomplir un voyage dans le temps. Au temps de mon enfance, en train de côtoyer mon enfant artiste qui sommeillait depuis si longtemps mais qui n’attendait qu’une petite occasion pour surgir et me rendre vivante.

Notre petit lapin noir s’appelle “Leila”. “Leila, comme la nuit en Hébreu” ont décrété mes enfants. “Avec Leila, la nuit ne nous fera plus peur”. Et dès qu’ils ouvrent les yeux et qu’il fait jour, c’est à Leila qu’ils pensent.

Leila est noire comme la nuit mais apporte déjà sa lumière.

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Référence : BM-PROP-2021-12-738
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