L'éducation
Construire ensemble un futur positif
« Le 24 juillet 2050, j’emmène mes enfants à l’école et ...on est sur Stella et il n’y a plus d’école, bon sang, bien sûr, je plaisantais et ce sont les enfants qui m’emmènent et j’ai les yeux bandés : ils vont m’initier à « leur » école.J’ouvre les yeux et Uzbeck me tend une liane : je pénètre avec les enfants dans ce qui ressemble à une agora centrale en plein air entourée d’alvéoles grésillant d’énergie et palpitant de murmures. Uzbeck s’élance sur une fine liane en poussant un cri d’enthousiasme vers la canopée de l’arbre à palabres : il clame mon arrivée et mes deux super-pouvoirs : l’agronomie en milieu extrême et l’introspection.Il invite tous les curieux à venir à ma rencontre dans les cimes.
Aussitôt, une cohorte de petits échevelés de quatre à dix ans suivie d’un sage clopinant, assortie d’un paresseux à trois doigts me rejoint :
Si tu l’acceptes, nous te lançons ce défi : apprends-nous tes super pouvoirs sans règles et sans principes.
Comment avez-vous envie d’apprendre ?
Les réponses fusent :
Petit CRI 1 : J’aimerais construire un nid aussi formidable que celui des paradisiers !
Petit CRI 2 : Je voudrais écouter l’histoire de ta vie et comment toi, tu as appris !
Dernier CRI : Avant de disparaître, je voudrais vous transmettre à tous les crises que j’ai traversées et que j’ai dépassées, et aussi le mythe du paresseux que je voudrais déconstruire pour le mauvais procès qu’on lui fait. Il n’est pas paresseux, il se hâte lentement (festina lente).
Petit CRI 3 : Apprends-nous surtout à faire mieux chaque jour avec peu, aussi peu qu’une plume ou un fil d’araignée.
J’avais tout compris : l’école était à la fois le chemin et la place, la ruche et la toile à tisser.Alors que notre cercle butine allègrement, le paresseux se balance devant moi en me regardant fixement et, tout d’un coup, dans ses yeux, je me vois et je me comprends.Ma fille, la petite Ricka, me sourit et m’explique :
tu vois Maman, le paresseux nous a appris à nous connaître. A force de l’observer et de l’imiter, nous avons découvert une transmission qui dépasse le langage et qui ne peut être codée : c’est l’empathie et l’hyper-sensibilité qui, dans le ralenti extrême de son mouvement, t’a donné accès à ton for intérieur sans jugement;
Ah Ricka, grâce à toi et grâce à cette rencontre, je vois avec humilité que je n’ai jamais fini d’apprendre : le paresseux m’ouvre la voie d’une introspection plus subtile.
Pendant ce temps, Petit CRI 1, Uzbeck et six copains, se sont attelés à la construction d’un nid de paradisier : des branches, des antennes mouvantes, des feuillages bigarrés croisées avec des plumes chamarrées et torsadés avec du fil de soie... Ils m’interpellent pour solliciter mon regard sur leur chef d’œuvre :Je commence par leur dire ce que j’observe et très vite, je leur relance la balle :
Dites-moi comment vous avez imaginé le nid de cet oiseau merveilleux ? Qu’est-ce qui vous a inspiré ?
Nous répondons en évoquant les oiseaux que nous avons observés, le nid de la perruche de CRI 5, les notes que nous avons glanées lors d’une expédition de bird watching, la sensation des matériaux, l’envie de beauté.
Alors, ce beau nid, comment pourrions-nous le rendre plus solide et douillet pour tous y rentrer ?
Vieux CRI sort alors de sa poche une graine et la dépose dans le nid en chantonnant un hymne sacré. Uzbeck, Ricka, et tous les petits CRI, émus jusqu’au tréfonds, versent une larme qui donne naissance à un tapis de mousse élastique.
par Carine, Marianne et Manon
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